CSRD : un sursis pour peaufiner ses engagements de RSE

L'Union européenne a revu le calendrier des échéances de publication des rapports de durabilité que fixait la directive CSRD de 2022. C'est le résultat du "paquet Omnibus" présenté fin février 2025. Dans l'intervalle, les démarches volontaires continuent.

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Il aura fallu moins de deux mois pour que la proposition dite « Stop the clock », issue du paquet Omnibus du 26 février 2025, soit publiée au Journal officiel de l’UE. Elle entérine le report de deux ans des échéances de la directive CSRD pour les entreprises assujetties à partir de l’exercice 2025. La proposition ne concerne pas les grandes entreprises cotées, celles qui rendent actuellement leur premier rapport de durabilité. A noter que l’application de la législation sur le devoir de vigilance (CS3D) est elle aussi différée (lire notre dossier Achats responsables). En France, les parlementaires ont déjà pris les mesures pour adapter la loi nationale à ce nouveau calendrier, la directive originelle ayant été transposée en 2023.

CSRD : de quoi parle-t-on ?

La directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) vise à renforcer la transparence des entreprises européennes en matière de durabilité et à encourager une approche responsable de leurs activités, en raisonnant selon le prisme ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). Cela se traduit par une obligation de publier un rapport de durabilité annuel, rédigé sur la base d’informations standardisées, qui sont détaillées dans douze grands référentiels : les ESRS (European Sustainability Reporting Standards). Une obligation d’application progressive en fonction de critères spécifiques (taille, CA et bilan). Toutes les entreprises assujetties doivent faire vérifier leur rapport par un auditeur dûment enregistré à la Haute autorité de l’audit (H2A), prestation qu’AFNOR Certification propose depuis le 1er janvier 2025 en tant qu’organisme tiers indépendant accrédité.

Au départ, la CSRD devait concerner plus de 50 000 entreprises européennes. Nombre d’entre elles s’astreignaient déjà à la publication d’un rapport extra-financier, en particulier en France dans le cadre de la DPEF (déclaration de performance extra-financière). Mais jusqu’à présent, le choix des informations à y faire figurer était relativement libre, ce qui rendait la comparabilité des données plus difficile.

Le report, une opportunité pour se préparer

Quel nouveau calendrier le texte « Stop the clock » fixe-t-il ? Pour les grandes entreprises cotées, celles de la vague 1 (remplissant deux des critères suivants : plus de 500 salariés, chiffre d’affaires supérieur à 50 M€, total de bilan supérieur à 25 M€), il ne bouge pas : elles doivent se conformer dès maintenant. Les autres, essentiellement les grandes entreprises non cotées et PME cotées (vagues 2 et 3), bénéficient d’un temps supplémentaire. En l’occurrence, un sursis de deux ans, c’est-à-dire une première publication en 2028 sur les données 2027, et en 2029 sur les données 2028.

Point important : la directive Stop the clock ne touche qu’au calendrier ; elle ne touche pas au contenu des informations à faire figurer dans les rapports de durabilité. C’est donc le référentiel actuel des 12 normes ESRS qui continue de s’appliquer, avec toujours une analyse de double matérialité. Toutefois, le report calendaire laisse le temps au trilogue européen de faire évoluer le périmètre des référentiels et la granularité des données à collecter dans l’entreprise. L’EFRAG, l’instance qui a mis au point les ESRS, a été saisie d’une demande de simplifier ces « datapoints » et de rendre sa copie pour le 31 octobre 2025. Une des pistes serait de tendre vers le modèle dit VSME, un référentiel inspiré des ESRS pour les petites et moyennes entreprises, jugé plus lisible et accessible. A terme, ce modèle allégé pourrait peut-être remplacer l’ensemble des ESRS pour toutes les entreprises de moins de 1 000 salariés, si le trilogue européen amené à retravailler le contenu de la directive valide cette piste et ce nouveau seuil (le plus élevé étant pour l’instant 500 salariés). Les plus grosses continueraient d’utiliser les ESRS d’origine.

Poursuivre les démarches volontaires avec l’ISO 26000

Pour de nombreux observateurs, cette perspective d’un allégement drastique des ESRS, doublée du report du calendrier, va à l’encontre de l’objectif initial de la CSRD, c’est-à-dire offrir aux entreprises un cadre pour améliorer la transparence et la comparabilité des données RSE, et ainsi tuer dans l’œuf toute forme de greenwashing. La CSRD fait ici les frais d’une séquence politique commencée avec le rapport Draghi fin 2024 puis la nouvelle présidence américaine, assimilant tout nouveau crantage dans les démarches de RSE à un obstacle à la compétitivité économique d’une entreprise.

Quoi qu’il en soit, directive ou pas directive, décalage ou pas décalage, VSME ou pas VSME, la durabilité n’est pas une option. Les péripéties réglementaires sur le reporting ne doivent pas empêcher les démarches volontaires de se poursuivre. En premier lieu celles basées sur la norme ISO 26000, norme mère de toutes les démarches de RSE. De facto, les entreprises ayant obtenu le label Engagé RSE d’AFNOR Certification , signe de reconnaissance basé sur cette norme internationale, apparaissent en avance de phase et se trouvent ainsi avantagées dans la compréhension de la CSRD, la démonstration de leur performance RSE et la collecte de leurs données de durabilité. Un livre blanc d’AFNOR Certification, téléchargeable gratuitement ici , en fait la démonstration.