Groupe La Poste : le Centre de services ressources humaines Sud-Ouest est diplômé EFQM
Pourquoi un prestataire interne d’un grand groupe public s’investit-il dans l’EFQM ? Comment cette démarche se déroule-t-elle ? Quelle perception les équipes terrain en ont-elles ? Interview croisée de représentants du premier établissement de gestion et de paye à être diplômé EFQM en Europe.
La DO2P est la Direction Opérationnelle Paye & Personnel de la branche Services Courrier-Colis de La Poste. Créée en 2011, son cœur de métier est la Gestion administrative du personnel et de la paye (GAPP) de tous les postiers de la branche. Chaque mois, ses équipes traitent un portefeuille de plus de 160 000 effectifs en GAPP. Son organisation territoriale est divisée en 9 CSRH (Centre de services ressources humaines) qui s’étendent sur l’ensemble du territoire de la France métropolitaine. À l’exception d’un CSRH e-services (front office), ce sont les 8 autres CSRH qui se sont, ou vont s’investir, dans une démarche EFQM. Avec Fabien Derain, directeur qualité de la DO2P, Gilles Duverneuil, directeur du CSRH Sud-Ouest, Catherine Chevallier, responsable qualité du CSRH Sud-Ouest et Guillaume Lacombe, encadrant sur le site de Cahors, observons comment l’EFQM fait son chemin dans un service support d’un grand groupe comme La Poste qui réalisait, en 2012, plus de 21 milliards € de chiffre d’affaires.
La DO2P : une fonction support de la branche Services-Courrier-Colis de La Poste
Fabien Derain nous précise que sous l’impulsion de Pierre Agullo, cette branche a initié dès 2007 une démarche EFQM.
« C’est là qu’il a adapté le modèle EFQM sous la forme d’un passeport afin de faire bénéficier les établissements opérationnels courriers (tri et distribution) de tous les avantages qu’apportent la démarche EFQM : autoévaluation, mise en place d’actions concrètes, caractérisation des progrès réalisés et objectif d’aller vers l’excellence. L’idée était de nous appuyer sur le modèle EFQM comme l’avait fait Pierre Agullo. C’est logique, puisque nous sommes un prestataire interne de la branche, nous nous devons donc de nous situer au même niveau d’engagement et de service. »
C’est ainsi que le passeport EFQM a été réadapté pour répondre à un double enjeu : une transformation interne très forte, avec le souci de toujours mieux gérer la GAPP et offrir une qualité de service équivalente, voire meilleure, que celle que peuvent proposer des entreprises externes.
« Pour ce, poursuit Fabien Derain, nous avons réussi à définir 100 approches clés qui balaient à 360° toutes les problématiques de nos CSRH. C’est une forme de fil rouge d’auto-évaluation. Nous avions un choix à faire : soit engager la DO2P dans son ensemble dans une démarche EFQM, soit développer celle-ci à un niveau opérationnel pour la faire vivre sur le terrain. C’est, vous l’avez compris, cette dernière option que nous avons choisie. Les gains attendus sont très clairs. C’est avant tout une occasion formidable d’embarquer toutes les équipes dans une aventure fédératrice. Nous ne sommes pas dans un schéma « top-down » mais dans un processus où ce sont les personnes concernées qui vont choisir leurs priorités et chercher à obtenir les résultats qui comptent à leur niveau. L’autre gain concerne les résultats. L’EFQM c’est aussi 12 indicateurs, dont l’indicateur RH qui concerne aussi bien l’absentéisme que le bien être des collaborateurs (salariés et fonctionnaires). Dans ce cadre, les 100 approches clés permettent d’améliorer ces 12 indicateurs et deviennent ainsi de véritables leviers stratégiques au niveau opérationnel dans les établissements CSRH. »
Fabien Derain nous a décrit la genèse du projet EFQM, son organisation, ses tenants et aboutissants. Observons à présent la mise en place de la démarche EFQM sur le terrain. Le CSRH Sud-Ouest s’est proposé comme pilote pour lancer l’opération qui sera généralisée, à l’ensemble du territoire, en 2015/2016.
L’importance d’une bonne communication
Pour Gilles Duverneuil, la démarche EFQM « est avant tout une démarche qualité. Au début, c’était surtout un challenge, avec la création d’une évaluation spécifique à la GAPP. Nous entrions dans un domaine d’activité qui n’avait jamais été approché. L’avantage que nous avions était d’avoir une équipe dirigeante renouvelée. C’était une bonne opportunité de fédérer un collectif à travers une démarche très structurante. » C’est en effet une des nombreuses définitions de l’EFQM : provoquer une dynamique de progrès avec des objectifs mesurés d’amélioration continue. C’est la culture de l’excellence !
« Ce qui était aussi important, poursuit Gilles Duverneuil, c’est qu’en tant que prestataire interne de la branche Services-Courrier-Colis nous nous appliquions le même niveau d’exigence que celle-ci, qui était déjà engagée dans une démarche EFQM. En plus, le fait d’être pilote nous obligeait à avoir une phase préparatoire très structurée afin d’embarquer toutes nos équipes (NDLR : 220 personnes au total) à travers les différentes étapes de la démarche EFQM. » À ce propos, Catherine Chevallier précise qu’il a fallu bâtir tous les outils de communication. « Nous étions pionniers et allions être le premier centre de gestion et de paye en Europe à entrer dans l’EFQM il était plus que nécessaire d’expliquer, à chaque étape, le pourquoi et le comment. »
Dans le temps, la phase de construction a duré 3 mois, de février à avril 2013. Ensuite, avec les différents avis qui ont pu être recueillis en interne, le modèle a été adapté avec le CSRH Sud-Ouest. C’est donc en juillet 2013 que Patrick Paris, délégué AFNOR pour l’EFQM France, a donné son accord pour la mise en place de ce modèle. Le 30 septembre 2013, le CODIR et les équipes du CSRH Sud-Ouest ont réalisé l’autoévaluation et d’octobre 2013 à mars 2014, 25 actions retenues ont été progressivement mises en œuvre.
« Avec régulièrement des points d’étapes, souligne Catherine Chevallier, afin de toujours communiquer sur l’avancement de notre démarche. » Le 15 avril, enfin, après une évaluation à blanc le 7 mars, Patrick Paris a évalué officiellement le CSRH Sud-Ouest pour savoir s’il pouvait prétendre au passeport 1* de l’EFQM. « Nous avons tous été très fiers d’avoir réussi, d’être ainsi diplômés, se souvient Gilles Duverneuil. Nous ouvrions la voie à tous les autres CSRH, notre travail était récompensé et nous pouvions revendiquer être le premier centre de gestion et de paye en Europe à être reconnu EFQM. »
L’EFQM, pour une amélioration tous azimuts et de bon sens
Observons maintenant les transformations qu’une démarche EFQM apporte à une structure comme le CSRH Sud-Ouest. Catherine Chevallier : « Cette démarche a donné à notre Codir une opportunité unique de faire un bilan collectif détaillé. Le modèle nous a indiqué le cap à suivre dans tous les domaines, RH, production, gouvernance etc.. Il décrit ce que fait une entreprise excellente. Cela ne veut pas dire que nous sommes excellents sur les 25 actions lancées , mais que nous nous engageons pour consolider ce que nous faisons bien et mettre en place les actions d’amélioration choisies . Le modèle EFQM mêle à la fois bon sens, une réelle professionnalisation de nos pratiques, et l’envie d’y aller en favorisant la cohésion des équipes. » Ce que confirme Gilles Duverneuil : « C’est en effet remarquable de réussir à entraîner tout le monde pour donner une vraie photographie de la réalité de notre CSRH. Par exemple, pour l’évaluation, nous nous sommes challengés en prenant des personnes de tous nos sites. Des personnes qui ne se connaissaient pas, de Niort, de Bergerac, de Pau etc. et qui ont permis la création d’un focus groupe, qui a fait la démonstration d’une belle dynamique de groupe. Une fierté. Pour les 220 personnes qui réalisent la GAPP, c’est la preuve qu’elles sont une véritable entité qui crée de la valeur ajoutée. »
Plus pratiquement encore, l’EFQM a permis d’aller chercher du chiffre d’affaire inversé. Explications de Gilles Duverneuil :
« Nous avons amélioré notre niveau de recouvrement de subrogation. La démarche EFQM, nous a incités à installer de vrais contacts avec les différentes CPAM afin d’accélérer ainsi le remboursement des sommes d’argent que nous avançons aux salariés. C’est de la marge nette en plus pour le Groupe ! »
L’EFQM, un regard extérieur qui valorise
Le CSRH Sud-Ouest a plusieurs sites : Limoges, Niort, Bordeaux, Bergerac, Pau et Cahors. Nous nous sommes entretenus avec Guillaume Lacombe, encadrant de ce dernier site. Voyons avec lui certaines actions concrètes qui ont été réalisées grâce aussi au challenge de décrocher l’EFQM passeport 1*.
« Avant de citer différentes actions, je pense que nous devons revenir à la journée d’évaluation effectuée par Patrick Paris. Dans un premier temps ce fut le CODIR, c’est-à-dire les membres porteurs qui nous ont proposé l’EFQM qui a été évalué. Ensuite est venu le tour des équipes de tout un site, celui de Bergerac, qui est passé sous le feu roulant de toutes une série de questions qui ont permis à l’évaluateur de juger les différentes actions mises en place et les améliorations constatées. Enfin, ce fut au tour du focus groupe, dont Gilles Duverneuil vous a parlé et auquel je participais, qui devait aussi répondre à différentes questions. Il exprimait aussi notre perception de l’EFQM et comment sa mise en place avait confirmé une voie que nous avions déjà ouverte : celle de l’amélioration de la qualité du service. C’est à ce moment-là que nous avons parlé de nos actions comme la mise en place d’un cahier de sécurité, le contrôle et la mise à jour des affichages, la présence de défibrillateurs sur tous les sites, ou encore le suivi et l’organisation des espaces temps communication. Nous avons ainsi fait la preuve que le concept EFQM était aussi bien passé au niveau des sites que de la direction. »
Guillaume Lacombe se souvient aussi du jour de la remise du passeport 1*. « C’était au cours de notre journée « esprit de service », le 12 juin dernier. C’est une journée nationale et annuelle organisée par la DO2P. Elle permet d’échanger et de faire des jeux de rôle pour favoriser l’esprit d’équipe et la satisfaction clients. Dans l’après-midi donc et en direct de Bordeaux où avait lieu la remise du passeport EFQM, nous avons tous pu, dans chacun des sites de notre CSRH, profiter de cet instant via une visioconférence. Même ceux qui n’avaient pas participé à l’évaluation directement ont vécu cet instant avec un vrai enthousiasme. C’était vraiment l’ensemble du service qui était récompensé. J’ajouterai, pour conclure, que même si nous nous appliquons depuis longtemps à réaliser un travail de qualité, le fait d’être reconnu par l’EFQM a vraiment la force d’un regard extérieur qui nous valorise. Pour le personnel, c’était vraiment important de savoir concrètement que nos pratiques au quotidien tendent vers l’excellence. Et le fait d’être les premiers en Europe, dans notre domaine, à avoir franchi cette première étape EFQM d’engagement vers l’Excellence, c’était un peu comme la cerise sur le gâteau. »