Le plein de normes volontaires pour la mobilité hydrogène
« L’hydrogène peut devenir l’un des piliers d’un modèle énergétique neutre en carbone. Cette molécule, qui renferme énormément d’énergie, va devenir indispensable compte tenu de l’étendue de ses propriétés : elle permet de stocker l’électricité, d’alimenter des voitures, de recycler du CO2, de rendre les processus industriels plus propres… » Ainsi parle Nicolas Hulot le 1er juin 2018 en présentant son plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique, organisé autour de trois grands axes : créer une filière industrielle décarbonée, développer des capacités de stockage des énergies renouvelables, développer des solutions zéro émission pour les transports routiers, ferrés et fluviaux. Un plan assorti d’un budget de 100 millions d’euros, géré par l’ADEME, et d’objectifs de déploiement au sein des flottes de véhicules professionnels, lourds comme légers.
Le calendrier étant bien fait, cette annonce survient à quelques semaines de la publication de plusieurs normes volontaires, faites par et pour les acteurs de ce marché en devenir, dans le but de les aider à appliquer les bonnes pratiques. « Il s’agit de la déclinaison, à échelles européenne et nationale, de normes internationales ISO. Elles seront utiles pour appliquer la directive européenne de 2014 sur les infrastructures de ravitaillement en carburants alternatifs, qui impose de déployer des stations à hydrogène (en plus du GNV, du GPL et de bornes électriques) le long des réseaux routiers de l’Union européenne. En particulier pour garantir la sécurité et l’interopérabilité des équipements », détaille Frédéric Solbes, secrétaire de la commission de normalisation Technologies de l’hydrogène chez AFNOR, qui regroupe grands groupes industriels et PME-PMI de la fillère.
NF EN 17127 : pour des stations de recharge sûres et interopérables
Ces normes volontaires fondatrices sont au nombre de trois. La première, libellée NF EN 17127, s’intéresse aux stations de recharge en hydrogène gazeux. La deuxième, NF EN 17124, spécifie les caractéristiques de qualité de l’hydrogène distribué et l’assurance qualité correspondante, afin d’assurer l’uniformité du produit pour une utilisation dans des véhicules routiers équipés de piles à combustible à membrane à échange de protons. La troisième, NF EN ISO 17268, couvre les dispositifs de raccordement pour le ravitaillement des véhicules terrestres en hydrogène gazeux pour en définir les caractéristiques de conception, de sécurité et d’exploitation. Toutes trois sont attendues au Comité européen de normalisation pour août et pour publication dans la collection AFNOR dans la foulée.
Comme toutes les technologies émergentes, la filière hydrogène ne se développera pas sans garantir qualité, sécurité et interopérabilité. Sur ce point, les normes volontaires sont d’une aide incontournable. Mais elle ne prendra pas non plus son essor si le gain écologique qu’elle procure à l’échappement est annihilé par les conditions de fabrication en amont. En effet, l’hydrogène ne se trouve pas tel quel dans la nature. Il faut l’extraire d’une molécule plus complexe, soit l’eau à l’aide d’une électrolyse, soit un hydrocarbure par le biais d’un procédé appelé réformage. Dans un véhicule équipé d’une pile à combustible, l’hydrogène ainsi produit est mis au contact de l’oxygène de l’air pour créer un courant électrique et mouvoir les roues, avec comme seul sous-produit de l’eau. Mais si l’un ou l’autre de ces procédés est source de CO2, le système perd tout son intérêt écologique : l’électrolyse ne peut être propre que si elle est réalisée à l’aide d’électricité décarbonée, et en particulier de sources renouvelables, et le reformage n’a de sens que si l’hydrocarbure utilisé (propane, butane) n’est pas d’origine fossile.
Bref, pas de mobilité hydrogène sans sérieuse analyse de cycle de vie. Un exercice lui aussi encadré par la normalisation volontaire !
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