Microplastiques : la France se jette à l’eau

Au croisement des enjeux de santé publique et d’environnement, la France s’apprête à publier une norme volontaire qui rend possible, pour la première fois, la mesure des microplastiques dans l’eau.

Écoutez cet article :
Temps de lecture : 4 minutes
Microplastiques : la France se jette à l’eau

Des microplastiques dans les nuages, comme s’en alarmait récemment le magazine Géo ? Oui forcément, puisqu’il y en a dans l’eau ! « Chaque fois qu’il pleut, il pleut du plastique », annonce ainsi le site plasticforecast.com , qui nous donne désormais la météo du plastique, avec un graphisme percutant. Même quand le ciel est bleu, les Parisiens reçoivent des « précipitations » de plastique de l’ordre de 40 kilos par jour… Et par temps de pluie, c’est jusqu’à 420 kg de plastique qui s’abattent !

Météo d’un nouveau genre, « The Plastic Forecast » a été lancée à Paris en mai 2023 parce que notre capitale accueillait alors la deuxième phase des négociations autour du traité international de lutte contre la pollution plastique. Un traité lui-même initié par la cinquième Assemblée des Nations unies pour l’environnement – et qui devrait atterrir en 2024.

 

Microplastique dans l’eau : un défi mondial

Mais d’autres se sont déjà retroussé les manches… et c’est encore en France que ça se passe. AFNOR publie en effet en janvier 2024 une norme volontaire qui propose une méthode consensuelle de mesure des microplastiques dans les eaux ultra-pures (utilisées pour les semi-conducteurs ou encore l’industrie pharmaceutique), les eaux destinées à la consommation humaine et les eaux souterraines brutes. De quoi établir un langage commun… pour évaluer, comparer et ne pas se tromper.

« La présence de microparticules, comprises entre 5 millimètres et quelques centaines de nanomètres, dans les eaux de rivières, les eaux de mer, l’eau du robinet et l’eau en bouteille est un problème avéré. Le résoudre commence par le fait de disposer de méthodes de prélèvement et d’analyse fiables, pour pouvoir comparer les résultats obtenus », explique Laurie Jardel, au département Ingénierie, construction, cycle de l’eau et matériaux d’AFNOR, qui a accompagné les professionnels dans la rédaction du texte.

 

Vers la normalisation des méthodes de traitement

La norme française, conçue en deux parties libellées NF T90-968-1 et 2, sera portée aux niveaux européen (CEN-Cenelec) et international (ISO). Elle devrait par la suite servir d’appui à l’analyse des microplastiques dans d’autres matrices : aliments, compost, sols, eaux de rejet… et bien sûr les eaux de pluie que nous évoquions plus haut. Elle pourrait aussi ouvrir la voie à la normalisation de méthodes de traitement : il faudra en effet, dans un second temps, isoler ces plastiques, puis les traiter voire les recycler, pour les plus macroscopiques.

« C’est une norme-chapeau, on pourrait très bien imaginer la décliner par type d’action ou par industrie, souligne Maud Liron, responsable du développement de la normalisation pour les thématiques eau et biodiversité chez AFNOR. Je lui souhaite un avenir, ou plus exactement une appropriation par le marché, à la hauteur de sa qualité. » Une norme à voir également comme un complément technique à la NF ISO 46001 sur les systèmes de management de l’utilisation efficiente de l’eau, peu connue et peu utilisée en France, mais qui demande à l’être davantage au regard des nouvelles problématiques de stress hydrique.

Vous êtes intéressé.e ? Anticipez la parution des normes NF T90-968-1 et 2 en participant au webinaire du 18 décembre 2023. Vous pourrez échanger avec les experts ayant contribué à la norme : entreprises (Veolia, Nestlé, Phytocontrol, Danone Waters), organismes de recherche (Inrae, Ifremer), représentants de l’Etat (Anses, collectivité Nice Côte d’Azur), etc.