Secteur public : ce que vous devez changer pour mieux accueillir les usagers
Comme les entreprises, les services publics territoriaux font face à des évolutions qui les conduisent notamment à revisiter leur politique d’accueil des usagers. Revue de cinq tendances essentielles, exposées par Halimah Pujol, déléguée secteur public du groupe AFNOR.
En 2050, à votre arrivée dans un hôpital ou dans une mairie, serons-nous encore accueillis par une vraie personne ? A en croire certains scénarios, c’est peu probable : « Il y a 91 % de chances que le métier d’agent d’accueil disparaisse, selon le selon une étude simulant les métiers de demain, popularisée par la BBC », annonce Halimah Pujol, déléguée secteur public du groupe AFNOR. Cette projection quelque peu alarmiste signale la nécessité de poursuivre la transformation d’un métier-pivot pour les collectivités territoriales. Les citoyens expriment de nouvelles attentes à l’égard de la sphère publique. Plus connectés, plus exigeants, connaissant mieux leurs droits, plus impliqués sur les enjeux sociétaux et le « bien-vivre », ils se montrent attentifs à l’écoute que leur accordent leurs administrations, aujourd’hui en phase de reprise d’activités. « C’est in fine une question de cadre de vie et d’attractivité économique, partagée par tous les services publics, au-delà des courants politiques », affirme l’experte du groupe AFNOR.
L’agent d’accueil devient un « chargé de » ou un « conseiller »…
Résultat : sur le portail de la fonction publique, on voit apparaître un nouveau libellé de poste : « chargé / chargée de relation et de service à l’usager ». Mais dans sa description, cet emploi de référence est bien celui d’un agent d’accueil, enrichi. Les missions intègrent progressivement des notions de conseil, de médiation ou de facilitation, voire de gestion des conflits. Elles donnent un nouveau sens à la fonction, en lui permettant, au passage, d’échapper à l’intelligence artificielle, car pour recevoir, aiguiller, échanger, conseiller et faire de l’intermédiation, il faut beaucoup d’intelligence relationnelle qu’un logiciel sophistiqué n’a pas. Cette évolution implique néanmoins que les agents montent en compétences, avec souvent formation à la clé.
La transformation digitale de la fonction publique
Sans surprise, le numérique est une tendance forte, déjà dessinée par le programme gouvernemental « Action publique 2022 » et son objectif de développer des services dématérialisés. « Cela ne veut pas dire que le numérique devient le canal exclusif, mais bien qu’il doit être disponible et performant pour offrir des services aux citoyens », précise Halimah Pujol. Pour les directeurs informatiques des collectivités devant dématérialiser l’accès à de multiples services jusqu’alors assurés en face-à-face, c’est un chantier immense. C’est également le cas pour tous les agents, qui doivent intégrer dans leurs missions quotidiennes ce canal où ils ne sont pas en contact physique avec leur interlocuteur.
Mettre en place des process qualité robustes
La transformation de la relation aux populations a des impacts RH, logistiques, informatiques, de communication et politiques. Pour orchestrer de tels projets, les administrations doivent positionner ce projet au cœur de leur action, avec des process basés sur les meilleures pratiques. Les démarches de performance publique, à l’instar de celles impulsées par l’ISO 9001 ou Qualivilles, demeurent en cela très structurantes, car systémiques. A défaut, les administrations s’exposent à plusieurs risques : rencontrer peu d’écho au sein des agents des parties intéressées en général, qui ne se retrouvent pas dans le projet, ne pas arriver à évaluer la pertinence des actions, se trouver en panne d’outils pour en rendre compte, manquer de réactivité pour ajuster les moyens mobilisés…. L’exigence de réussite que s’imposent les agents publics se doit d’être soutenue, et les bonnes pratiques issues des standards sont là pour ça.
Soutenir le dialogue et la participation
Au même titre que les consommateurs notent sur Internet les services d’un hôtel, un restaurant ou un appareil photo, les services publics forgent de plus en plus leur réputation sur la base d’avis en ligne. Sites dédiés à la question ou grandes plateformes, tous offrent une tribune aux internautes qui peuvent s’y exprimer, donner des notes et interpeller le bon service. Les administrations doivent désormais s’organiser pour veiller ce qu’il s’y dit, prendre en compte les avis de manière constructive et donner le change, en nouant le dialogue. Là encore, les collectivités territoriales peuvent s’appuyer sur des bonnes pratiques, pour avoir une approche offensive et positive sur cette question. Cela rejoint la nécessité de faciliter la participation des citoyens à la vie de la cité. Les acteurs publics sont désormais attendus sur cet enjeu, pour favoriser une citoyenneté active. Développer des budgets participatifs, susciter le vote pour des projets… C’est un nouveau ressort de la vie démocratique à encourager.
Dépasser les frontières administratives
La performance d’un service d’accueil dépend, en premier lieu, de ce qui est engagé par l’administration centrale. Pour autant, les managers territoriaux ont désormais intérêt à penser leur service au plan territorial, en dépassant les frontières administratives. Le citoyen redoute le millefeuille de services de la Région, de l’intercommunalité et de la ville. Les schémas départementaux d’amélioration de l’accès aux services publics (SDAASP) permettent en cela de cartographier l’ensemble des services pour un territoire. Si certains parlent de « la ville du quart d’heure », où tout serait accessible à moins d’un quart d’heure de chez soi, il s’agit bien d’un enjeu essentiel : proposer, à moins de trente kilomètres, des services où l’on trouve de l’humain et un accompagnement de qualité pour tous les usagers.
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